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Négocier le temps d’écran

Où comment définir des règles d'utilisation du smartphone claires et efficaces avec ses ados.



un smartphone qui se déforme comme un sablier

Au printemps 2021, je m’interrogeais sur la place grandissante des écrans dans la vie de mes enfants, et l’influence d’un usage intensif du smartphone sur leur développement intellectuel, leur sociabilisation, la gestion de leur émotion, leur capacité d’attention, etc. Deux ans plus tard, mes enfants sont entrés de plein-pied dans l’adolescence. L’une et l’autre sont désormais équipées d’un smartphone, dont elles font un usage régulier, sans renoncer cependant à l’usage des tablettes numériques de la famille et bien sûr au grand écran du salon pour visionner leurs séries préférées sur « Netflix ». Nous voila désormais confrontés à l'omniprésence des écrans dans le quotidien des nos ados et la nécessité de définir avec eux des règles claires et efficaces d'utilisation de leur smartphone et des autres écrans. Une gageure !


Au détour d'un déjeuner amical


A l’occasion d’un récent déjeuner avec un ami, lui-même père de 3 adolescent-e-s, le sujet des écrans et de nos ados s’est naturellement immiscé dans notre conversation. Mon ami m’annonçait alors avec beaucoup de naturel comment le sujet avait été abordé dans son cercle familial à travers la mise en place d’une charte d’utilisation des smartphones et des réseaux sociaux. Une charte co-construite avec les intéressé-e-s, rédigée et signée par ses derniers. « Waow ! quelle belle initiative ! », m’exclamais-je à l’énoncé des paroles de mon ami, qui affichait un air tranquille et un sourire modeste.


Un aveu d'impuissance face aux GAFAM

Ma première réaction fut naturellement de tracer un parallèle avec ma propre situation familiale. Et la comparaison n’était malheureusement pas à mon avantage. Certes, depuis mon article de juin 2021, ma compagne et moi-même avions négocié avec nos ados un temps d’écran quotidien maximum, assorti d’une interdiction totale de leur utilisation après leur repas du soir, et le dépôt des appareils sur la table basse du salon familial. Dans les faits, le contrôle effectif du respect de ces consignes s’était effiloché au fil du temps, la faute à nos quotidiens toujours plus contraints. Le contrôle hebdomadaire du temps d’écran était depuis longtemps devenu un vieux souvenir, et s’était vu remplacé par un vague et peu convaincant commentaire sporadique : « tu fais bien attention à ton temps d’écran ? je contrôlerai demain » suivi d’une réponse tout aussi vague et peu convaincante de l’intéressée. Bref, la défaite en rase campagne face aux GAFAM était complète.

"tu fais bien attention à ton temps d’écran ? Attention, je contrôlerai demain !"

L’initiative de mon ami, en apparence si naturelle, éveillait cependant en moi un désir de revanche mû par un sursaut d’humour propre. Il ne serait pas dit en effet qu’un spécialiste de la communication numérique se laisse aller à une telle désinvolture vis-à-vis des GAFAM et de leur armée de spécialistes des neurosciences, bien décidés à asservir nos chères têtes blondes, et leurs géniteurs par-dessus le marché !


L'heure de la contre-attaque

C’était décidé, ce déjeuner aller augurer d’un rappel des troupes et de préparatifs minutieux en vue d’une contre-offensive qu’on espérait victorieuse. Sans coup férir, je m’enquérais auprès de mon ami de moults détails sur les conditions et le modus operandi ayant présidées à la rédaction de la fameuse charte, bien décidé à les reproduire au plus vite dans le cadre familial. Peu avare de ses conseils, mon ami m’expliqua l’affaire dans les moindres détails et poussa même la générosité jusqu’à me transmettre, une fois rentré chez lui, une photo de la charte familiale affichée en bonne place sur la porte du frigo.


Le week-end qui s’ensuivit, un conseil de famille était convoqué à mon initiative avec comme unique sujet à l’ordre du jour ce titre ronflant : « la gestion familiale du temps d’écran, enjeux et perspectives », qui suscita force soupirs et haussement d’épaules de la part de mes ados. Toutefois, à ma plus grande surprise, la discussion se déroula de manière très fluide et constructive, et accoucha – premier miracle – de la promesse de rédaction d’un projet de charte pour le dimanche prochain. Au terme du délai imparti – second miracle- , le texte produit s’avéra résumer particulièrement bien les enjeux soulevés lors de notre discussion. Il ne restait plus qu’à avaliser et contresigner le précieux document qui trône désormais lui aussi sur notre frigo familial. Il va sans dire que j’empressais aussi, très fier de moi, d’en transmettre une photo à mon ami, sur le mode « tu vois, moi aussi, je l’ai fait ! »


La charte familiale en 5 points


Entrons (enfin) dans le vif du sujet avec le contenu de cette fameuse charte articulée en 5 points.

  • Temps d’écran limité : nos enfants s’engagent à respecter un temps d’écran limité, sujet à des modulations en fonction de leur âge, et du contexte (semaine, week-end, vacances).

  • Approche globale : la règle s’applique à l’ensemble des écrans disponibles dans la sphère familiale : smartphone, tablette et télévision du salon.

  • Dialogue avec les adultes : à la demande des parents, chaque enfant s’engage à expliquer de manière transparente quel usage il fait des écrans, le type d’application utilisée, les difficultés rencontrées, etc. En cas de dépassement des temps d’écrans convenus, les enfants doivent pouvoir justifier des raisons de ce dépassement lors d’un point hebdomadaire.

  • Pas d’utilisation nocturne : entre 8h du soir et 8h du matin, aucun écran n’est autorisé dans les chambres. Les smartphones des enfants - en mode avion - sont déposés dans le salon familial

  • Partage du code PIN : nos enfants nous transmettent le code PIN de leur appareil et acceptent que nous puissions consulter leur smartphone et leur application de messagerie si nous le jugeons nécessaire pour leur propre sécurité.


Tout reste à faire..

Reste désormais à mettre tout cela en pratique, ce qui risque de s’avérer de loin le point le plus épineux ! à suivre...


Pour aller plus loin :

Retrouvez la fameuse règle des 3-6-9-12 et d'autres conseils utiles pour les parents sur le blog du psychiatre Serge Tisseron


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Jean-Alexis Toubhantz

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Bienvenue sur mon blog. Au fil des articles publiés sur nos vies numériques, j’interroge les opportunités comme les menaces de la révolution numérique pour notre quotidien, nos sociétés démocratiques, notre vie culturelle, les prochaines générations, etc.

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