Réduire la fracture numérique
D’après une étude de l’Union internationale des télécommunications (UIT) publiée en septembre 2022, l’essor de l’internet à l’échelle mondiale, qui avait connu une accélération significative dans le contexte de la Pandémie de Covid-19, marque désormais le pas. La réduction de la fracture numérique est confrontée à des problèmes structuraux, qui rendent de plus en plus illusoire l’objectif ultime que s’est fixé l’organisation de connecter l’ensemble de la population mondiale à l’horizon 2030. Derrière ce ralentissement de la croissance d’internet, se cachent d’importantes disparités régionales, qui épousent l’inégale répartition des richesses à l’échelle mondiale.
D’après les dernières estimations de l’UIT[1], le monde compte aujourd’hui 2,7 milliards de personnes non connectées à l’internet, soit un tiers de la population mondiale. En soit, ce chiffre est déjà une source d’étonnement, à l’heure où internet et les réseaux sociaux occupent une place centrale dans notre quotidien, et s’immiscent dans toutes les dimensions de nos sphères privées et professionnelles. Il est salutaire de se rappeler que cette réalité est loin d’être universellement partagée.
Pourquoi la progression d’Internet ralentit-elle ?
Dans son étude, l’UIT a identifié deux raisons majeures qui expliquent la difficulté accrue à connecter le tiers restant de l’humanité.
D’une part, les communautés non connectées sont celles qui vivent dans des zones reculées et difficiles à atteindre, et pour lesquelles le coût des investissements nécessaires à la mise en place de l’infrastructure sous-jacente à la diffusion de l’internet est malheureusement prohibitif au regard de la densité de population à connecter.
D’autre part, l’UIT pointe plusieurs dimensions souvent négligées ou sous-estimées dans les efforts déployés pour connecter une population donnée et favoriser l’usage d’internet au quotidien au sein de cette même population. En effet, avoir accès à internet est une première étape, mais son adoption au quotidien par la population connectée implique une série de facteurs additionnels qui sont encore rarement présent dans de nombreuses régions du monde. Parmi ces obstacles majeurs à la diffusion d’internet, la qualité de l’infrastructure et de la connexion internet viennent spontanément à l’esprit. L’IUT souligne cependant que les causes principales au ralentissement de la progression de l’internet sont aujourd’hui liées à l’accessibilité financière du matériel, au manque de compétences numériques, aux barrières linguistiques et à l’analphabétisme, mais aussi aux discriminations liées au genre ou à l’absence de source d’énergie fiable.
Cette étude démontre à nouveau combien l’inégale répartition de la diffusion d’internet est étroitement liée aux inégalités socio-économiques et culturelles, et concernent en premier lieu les communautés humaines qui sont déjà les plus défavorisées, mais aussi souvent victimes de discrimination ethnique et/ou de genre.
Fortes disparités régionales
Le second volet de l’étude de l’IUT met en avant la persistance d’importantes disparités régionales dans la diffusion d’internet à l’échelle mondiale. Sans surprise, l’Europe et l’Amérique du Nord constituent les régions les plus connectées avec respectivement 89% et 80% de leur population en ligne. Suivent l’Asie et le Pacifique avec une connectivité de 64%. Les Etats arabes ont réalisés des progrès remarquables au cours des dernières années, pour atteindre aujourd’hui 70% de leur population connectée. L’Afrique reste la région la moins connectée avec seulement 40% de sa population en ligne, en dépit d’un effort de rattrapage important illustré par un taux de croissance de 13% en 2021 (contre seulement 7% à l’échelle mondiale). Toute la question reste de savoir si cette croissance à deux chiffres pourra se maintenir durablement sur le continent africain, notamment si les problèmes d’inégalité socio-économique pointées précédemment dans cet article ne sont pas mieux pris en compte.
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